La fontaine devant l'école, sur la place du village de Baldersheim. (entre 1955 et 1957)
Nous n'avions pas du tout l'eau courante à Baldersheim avant 1958. Chacun allait avec son seau chercher son eau, et on se lavait le matin dans de grands saladiers en faïence avec la cruche assortie au « saladier ». Je me souviens d'avoir été lavé, mon frère et moi dans de grandes bassines en zinc posés sur l'évier de la cuisine. Mais le plus souvent, les gens venaient laver directement à même la fontaine, pour ne pas avoir à se trimballer chaque fois le méchant seau de 10 litres qui vous coupait les doigts en sciant les mollets. Bien entendu, il y avait toujours du monde autour de la fontaine comme en afrique, les lions les gazelles et les éléphants autour des points d'eaux pour laver et discuter. Cette fontaine lieu de rencontre privilégé n'était d'ailleurs pas la seule dans le village !
Pour les W-C, les gens allaient chier dans de petites cabanes en bois, souvent au fond du jardin. En hiver, c'était particulièrement jouissif ! A Munster par exemple, après avoir longé la ginguette, on apercevait cette cabane au milieu d'un verger à l'abandon. Après avoir soulevé le couvercle en bois, je m'asseyais sur une planche trouée. Pour m'essuyer, il fallait prendre le papier (de vieux journaux soigneusement découpés par grand-maman) fixé avec un énorme clou rouillé sur le mur en planche de la cabane. Quand j'avais fini de m'essuyer et de lire les articles de journaux j'aimais bien regarder au fond du trou, la gigantesque pyramide de merdes que visiblement personne ne venait jamais vider... sans doute les nombreux vers de terre et autres « animaux » avaient-ils là de quoi s'occuper... mais peut-être le vidaient-ils quand même... mystère !
Pour les nouvelles, l'appariteur (Monsieur Lang qui m'aimait bien) venait devant la fontaine et attirait les gens avec une cloche, comme le père-Noël, mais sans le déguisement. En fait il était habillé comme un appariteur, képi et tout. Quand il estimait qu'il y avait assez de monde, il déblatérait ses histoires, (le plus souvent, ça concernait le village) puis s'en allait dans un autre coin du village pour faire tinter sa cloche... peut-être ne savait-il pas jouer de tambour !... quelle époque !